lundi 19 janvier 2009

Daddy's gonna pay for your crashed single


U2 revient. Get on your boots est sur les ondes depuis ce matin. C'est le premier single de l'album No line on the horizon à venir. Si j'en parle, c'est certainement pour tourner une page, ce n'est certes pas parce que le single en vaut la peine. S'il n'était pas signé du "plus grand groupe de rock du monde et des galaxies connues et inconnues", il passerait à coup sûr totalement inaperçu et il ne fait aucun doute qu'il sombrera dans l'oubli disons dès la fin de la tournée. A juste titre. Ou alors c'est plus grave que je ne l'imaginais. Avant de découvrir vraiment U2 - pas les tubes des années 80, mais Zoo station et tout l'album Achtung Baby, là ce fut la claque - je n'écoutais pour ainsi dire rien. C'était en 2000. Je plongeais dans le pop-rock façon rtl2. Depuis, j'ai dérivé vers du plus sombre, du plus libre, du plus sincèrement révolté sans doute... je suis sorti de la culture (celle qui a son ministère) pour chercher des artistes si je peux me permettre d'emprunter cette distinction à Marc-Edouard Nabe. Des mystiques. Des Nègres. Des métèques. Il a vite fallu faire exploser les barrières du pop-rock, on s'en doute. Noir Désir, Beethoven ont été les portes de sortie. Elles se sont, je crois, refermées derrière moi, je suis enfermé dehors et c'est tant mieux. De-ci de-là on trouve quelques hurluberlus qui font à peu près du rock (The Brian Jonestown Massacre)... mais pour moi ce n'est plus que qawwali, flamenco, opéra, jazz. Du transcendant, sacré ou profane. Pas du morbide vociféré les deux pieds dans le Système. Pas du Houellebecq le martyr de la société mais milliardaire quand même. Et justement, U2 avait commis son chef d'oeuvre - à mes yeux - dans une sorte de jubilation cynique, industrielle, glauque, sordide, anti-capitaliste avec Zooropa et le Zoo TV. Et alors quoi ? C'était du vent ? Ils étaient shootés ? Lemon ? Dirty day ? Vorsprung durch technik ? Du vent ? C'est aujourd'hui que j'écris, mais ça fait des années que la décomposition se fait sentir. Des best-of, n'en veux-tu pas en voilà quand même, des BO de films pour ados tu n'osais pas le rêver ils l'ont fait, des singles plus insignifiants les uns que les autres, passons. Get on your boots. Soi-disant orientalisant ? Je ne peux rien en garder. Rien. Je n'ai pas pu m'empêcher de rire en l'entendant, comme lors de la découverte de l'affreux Window in the skies, le dernier single qui accompagnait je ne sais quel best-of. J'ai trouvé ça ridicule, pathétique, et honteux pour tout dire. C'est de la musique jetable, sa raison d'être est de créer le buzz quelques semaines autour du groupe qui de toute façon remplira les stades à coup de Where the streets have no name ou New Year's Day... Et puis le single permettra de vendre l'album en édition collector avec dvd, avec un dessin de mérou par Bono quand il avait 3 ans et lunettes de soleil portées par Larry à l'été 2002. N'y a-t-il aucune limite ? Où est U2 ? Dans les années 2000 ou dans les années 90 ? Ou alors, je n'avais rien compris aux tournées mégalos ? On peut vraiment passer de Daddy's gonna pay for your crashed car à ce cirque ? Jusqu'où peut-on descendre ? Ce n'est sans doute pas un hasard s'il est question de bottes, on s'enfonce jusqu'au cou. Pour mon compte, la coupe est pleine. Je réécoute Zooropa en boucle.


PS : je rajoute après avoir vu la prestation du groupe pour Obama que tout cela n'est pas pour redorer leur blason. On sent bien qu'ils y croient, et sont contents. Mais enfin, le rêve de Martin Luther King... oui ? non. Je n'en dis pas plus, je trouve ça assez pathétique. Une vidéo de Noam Chomsky à propos d'Obama, ça suffira.

mercredi 14 janvier 2009

Je ne sais pas si vous l'avez remarqué...

... mais comme ce blog connait depuis le mois de décembre un succès intergalactique, peut-être se trouvent-ils là ceux qui, parmi les quelques hurluberlus patentés de lecteurs ont l'œil de matheux et la fibre de lynx ou l'inverse, c'est à votre convenance. Le problème, c'est qu'en postant aujourd'hui, je rends moins visible cet extraordinaire phénomène. J'ai publié 3 articles en janvier : le 2, le 7, le 12. Et par la disposition du calendrier, cela donne un régularité tout à fait singulière et dont je ne peux que m'étonner. Partez du 12, deux crans en avant, un cran en haut, vous arrivez au 7. Reproduisez en partant du 7 la même opération, vous arrivez au 2. Incroyable. J'ai tout simplement reproduit une droite de coefficient directeur 1/2 ! Et je pense que c'est la raison pour laquelle tant de pirates, surfeurs et autres tortues de mer se retrouvent sur ce blog ces derniers temps : pour ma prescience de la mathématique, oui la mathématique, pure et universelle. Les statistiques parlent d'elles-mêmes - et croyez bien qu'il me faut du courage pour écrire cette phrase qui a le privilège d'être parmi celles que je déteste le plus. Les chiffres ne parlent jamais d'eux-mêmes, et c'est M. Hortefeux qui me contredira et qui prouvera par là que j'ai raison. Mais enfin passons. Hormis les 2 premiers mois de ce blog avec avec 400 visites en moyenne, ça tournait avec environ 150 ou 200 visites par mois. Et voilà-t-il pas que le mois de décembre pointe avec 1000 visites ! Et presque le même rythme pour ce mois de janvier ! Les sentiers de la gloire s'ouvrent devant moi, hallelujah ! Il semblerait que je doive ce score notamment à l'article "Cavanna Sine Qua Non" qui a précédé un article quasiment semblable de quelques heures sur un site qui a mis mon mien en lien, tiens. Et aussi aux résumés des bouquins de Piaget, qui sont manifestement pillés par les googléens du monde entier, sans doute trop peu courageux pour se lancer dans leur lecture approfondie. Gloire à la Déesse Shiva sans laquelle rien de tout cela n'eut été possible !

lundi 12 janvier 2009

Le possible est plus riche que le réel ?

C'est Ilya Prigogine qui disait "le possible est plus riche que le réel". J'aime beaucoup cette phrase. Allez, je jette en pâture quelques noms, quelques commentaires peut-être, dans le seul but de ne pas les oublier d'ici à ce que je puisse me pencher plus sérieusement sur leurs cas.


Commençons par le dvd Cinéastes à tout prix de Frédéric Sojcher. Ce documentaire est consacré à trois cinéastes belges, quasiment privés de moyens, et qui tournent en Don Quichotte du cinéma. Ils sont parfaitement mégalos, et peut-être un peu psychopathes... et c'est ça qu'est bon, comme on dit. Ils s'appellent Max Naveaux, Jacques Hardy, et surtout Jean Jacques Rousseau (sans tiret, et ce n'est pas un pseudonyme), cinéaste de l'absurde par excellence dont Le diabolique Docteur Flak par exemple débute par un écriteau "20 ans après" ! Ce n'est que surréalisme, delirium tremens et créativité débordante. Et, que ça ait quelque chose à voir ou non, que ce soit surréaliste, pataphysique, ou quichottesque, je crois utile de parler de toutes ces choses grandes et magnifiques à découvrir., celles qui prouvent, comme le disait Albert Aycard, que la réalité dépasse la fiction.


La musique inaudible (si ce n'est par les chiens) de Michel Magne ; l'institut des mécontents (une fois qu'ils y entrent, les voilà contentés !) ; Le Petit Silence Illustré, la revue lancée par Jacques Sternberg, la seule revue qui n'a "strictement rien à dire" ; le catalogisme de Léon Bopp, philosophie de l'omnipotence ou logique qui englobe toutes les logiques existantes ou non - c'est pourquoi il termine toujours ses phrases par "etc.", cet etc. prouve à quelles tâches immenses il s'attaque. Et que dire de Cami, "plus grand humoriste in the world" disait Charlie Chaplin (excusez du peu) et de son M. Rikiki ? Résumons-nous : plus on avance, plus on recule. C'est tous azimuts qu'on a envie de s'élancer, pour combler ses considérables lacunes culturelles. C'est bien ce qui est effrayant.


Il me reste 300 pages à lire pour finir le premier tome des Chroniques de Vialatte. Je profiterai de l'occasion pour lire une petite rafale d'Alfred Jarry, l'inventeur de la 'Pataphysique dont un collège s'est investi en son honneur en 1948. La richesse de ce mouvement, dégagé dans tous les sens du terme dégagé et du terme sens, comme disait l'autre, est sans limite, semble-t-il. La 'Pataphysique est la science du particulier quand il ne saurait y avoir que science du général ; la science des solutions imaginaires. L'absurde y a certes toute sa place, mais ce n'est pas la négation du sens qu'elle pointe du doigt, mais sa surabondance. Tout vient du principe épicurien de clinamen, que les théoriciens du chaos n'ont fait que redécouvrir. C'est l'infime déviation des atomes qui permet au monde d'exister et à l'homme de n'être pas entièrement déterminé. Une notion dérisoire, une aberrance infinitésimale élevée au rang de Principe !Quelques pensées pataphysiciennes :


Alors qu'un gradé lui ordonne de balayer la cour de la caserne, Alfred Jarry répond : "Dans quel sens ?"


"Tout ce que je ferai sera de trop" Julien Torma


"C'est une grande science que de modeler son âme sur celle de sa concierge" René Daumal


"Le courage consiste à rester chez soi, face à la nature qui ne tient aucun compte de nos désastres" Joan Miro


"De deux choses lune / l'autre c'est le soleil" Jacques Prévert





La peinture de Jean Dubuffet, l'oeuvre d'Umberto Eco... mais enfin comment s'en passer ? Eco, par exemple. Et sa cacopédie : somme du savoir négatif ou somme négative du savoir, qui se propose d'étudier l'histoire de l'argiculture antarctique, la psychologie des foules en terres sahariennes, les techniques du tiers inclus, l'urbanistique tzigane ou la phonétique du film muet... avec de nouvelles disciplines telles la tétrapilectomie (art de couper les cheveux en quatre) ou la luthomiction (l'art de pisser dans un violon). Etonnant, non ? Allez, je raccroche, il y a Benoît Poelvoorde et Marc-Edouard Nabe chez Taddeï... A propos de Nabe, quand même... je suis sur le point de finir Les Nègres de Jean Genet, je ne saurais trop vous le conseiller tant le racisme, non ethnique mais culturel, social, y est laminé avec ironie, dérision et talent (dont manquent généralement les antiracistes primaires, dirait probablement Desproges).


Cornegidouille, j'aurais voulu parler de Choron dernière, du Matricule des anges, du blog de Dror... Bah, qu'en dire ? Simplement que si les altermondialistes demandent toujours un autre monde, celui-ci ou ceux-ci même, existent d'ores et déjà et qu'il suffit d'éteindre la télé et de s'échapper du discours dominant pour satisfaire sa curiosité...

mercredi 7 janvier 2009

Axel Kahn est terrifiant

Il m'arrive une drôlerie. Je me demande en effet et tout d'un coup pourquoi je parle toujours de la déesse Shiva. Alors qu'il s'agit bien évidemment d'un dieu, non d'une déesse. Mais je préfère que ce soit une déesse. Allez comprendre. Que la déesse Shiva me pardonne.


Mais enfin, ce n'est pas pour régler cette histoire que je vous ai fait venir. Il y a plus grave, des choses surprenantes se passent sans que l'on s'en rende bien compte et je compte bien corriger cette lacune perceptive. Hier soir, je regardais Ce soir ou jamais, l'émission de Frédéric Taddéï, la seule digne d'être regardée par mon illustre personne, n'est-il pas, il est ; et cela 30 minutes plus tôt qu'avant les vacances puisque notre ami président en a décidé ainsi que la publicité n'aurait plus lieu d'être sur le service public après 20h. Nicolas en soit béni. Deux précisions sur la phrase qui précède : 1/ Je ne suis pas devenu sarkozyste, ni berné sur les raisons de cette réforme, ni aveuglé sur la regression démocratique (nomination du président du CSA), ni surtout sur le scandale qui consiste à ce qu'une réforme entre en vigueur avant d'être votée par le Parlement, on aura tout vu. Je suis simplement content de ne plus avoir 15 minutes de propagande avant mon émission. 2/ Le verbe bénir a deux participes passés, apprend-on d'Alexandre Vialatte : béni et bénit. On emploie bénit avec l'auxiliaire être et béni avec l'auxiliaire avoir. Et si vous avez suivi, vous aurez constaté que j'ai commis une lamentable erreur avec "Nicolas en soit béni". Enfer et damnation ! Sauf que je n'ai rien compris à la règle ; car il semblerait qu'on utilise bénit pour ce qui est consacré par l'Eglise et béni dans tous les autres cas, sans qu'il soit donc question d'auxiliaire. Si quelqu'un a compris cette histoire...


Résumons-nous : je voulais parler d'Axel Kahn. Il participait à cette émission qui traitait de l'altérité, de l'universel et de l'individu, de l'identité, des presque 7 milliards d'êtres humains qui peuplent la planète. Avec d'autres invités plus ou moins brillants. Mais qu'Axel Kahn prenne la parole, et ce n'est plus que stupeur, effroi, et silence des élèves qui écoutent le maître incontesté. Tout concourt à cet étrange spectacle, car Axel Kahn sait tout, et le reste également. Le voilà, prêt à bondir, qui vous assène des Etrusques, des Carthaginois, et des Phéniciens qu'il amène par bateaux entiers. Vous ne savez quoi répondre, et vous ne pouvez d'ailleurs pas, vous êtes éberlué. Le plus beau là-dedans, c'est qu'il s'autorise à réduire son érudition par un geste de la main : oui, vous ne rêvez pas, il fait de son pouce et de son index une pince qui délimite sa science et y donne une invraisemblable autorité. Ce n'est plus un homme, c'est un crabe. Un crabe au pinces d'or. Et après un discours d'Axel Kahn, c'est le silence qui est d'or, alors qu'après un discours de Mauroy, c'est la France qui roupille disait Desproges. Axel Kahn dit, vous en êtes réduits à l'estomaquement. Et ce ne serait rien sans cette voix sèche, si sèche qu'elle tarit toute source de contestation. Bien sûr, il arrive qu'on ne soit pas d'accord avec Axel Kahn (ce qu'il a dit sur le voile ne me plaît pas). Mais ce qu'il a dit garde son importance. J'ai eu la chance, alors que j'étais en Staps, de le voir lors de la conférence inaugurale des "Journées de l'INSEP" où il avait traité d'éthique dans le domaine du sport. C'était renversant. Il était à l'époque président du Comité National consultatif d'éthique (que l'on me pardonne si les termes sont dans le désordre) ; il ne l'est plus. C'était sa place. A croire que le poste avait été créé pour lui. Après avoir demandé l'avis de quelqu'un comme lui (il n'y en a pas deux comme lui), on sait que nulle catastrophe éthique ne peut plus se produire. Il est donc rassurant. C'est pourquoi il est terrifiant. Lisez ses livres.

vendredi 2 janvier 2009

Amendement pour ce qui précède (suit)

Il est des hasards de l'espace-temps qui laissent pantois. A l'instant même où j'envoyais ma note précédente, je recevais un mail me confirmant l'envoi du Tome 2. Étonnant, non ?





Dieu soit béni, la déesse Shiva statufiée, et Bernard-Henri Lévy ridiculisé ! J'aime trop la déesse Shiva pour ne pas déplorer amèrement ma phrase précédente. Qu'à cela ne tienne.

Le progrès ne connaît plus de limites


Ah ! Cornegidouille ! De par ma chandelle verte ! Merdre ! J’ai parlé trop vite. Pas reçu le Tome 2 des Chroniques de Vialatte. Je crains ne pouvoir mettre la main dessus de sitôt. Si ce n’est en occasion, et encore. Mais je l’aurai, dussé-je, selon le mot de Don Quichotte, aller jusqu’au fond du ventre de la baleine dans laquelle il est caché !

J’ai du temps pour le trouver, car il m’en faudra encore pour terminer le Tome 1 ; et puis mille folies sont à lire, je ne serai pas pris dans la spirale du néant littéraire, non plus que je ne cèderai aux sirènes des plus sinistres têtes vides de gondoles. Et puis de toute façon, « il est urgent d’attendre ».

Vous parlerais-je en attendant du premier tome ? Oui. C’est que j’en suis à la chronique 81, autant dire que j’ai lu 80 chroniques jusque-là, étalées du 9 décembre 1952 au 22 juin 1954. Et puisque le calcul vous manquera jusqu’à vous empêcher de dormir ; et parce que vous ne savez probablement pas calculer un pourcentage, je le fais : 8,91 % des Chroniques font désormais partie de ma misérable culture. Mais pourquoi, direz-vous, cet ahuri parle-t-il en chiffres de ce qui ne saurait être quantifié ? Pourquoi ne pas en louer la Qualité, ce qui en est inestimable ? Par dérision. Par vialattisme. "Notre époque est friande de chiffres. A juste titre" (quel sens de l'ironie !)

Comment mieux parler de ce livre que tel que je vais le faire ? C’est un pavé aux dimensions extraordinaires à elles-seules, jugez plutôt :13 cm de largeur, 20 cm de longueur, et 3 cm de hauteur, s’il m’est permis de faire confiance à mon double décimètre. N’étant pas fort en calcul mental, je laisse le soin à ma calculatrice de révéler l’impensable : ce livre a un volume de 780 cm3 ! Je ne vous sens pas convaincus ! Que direz-vous alors quand vous saurez que c’est équivalent à 800 g d’eau de mer ! Ahurissant, non ? Prélevez 800 g d'eau de mer dans l'Océan Pacifique (il y a déjà assez de Paix dans le monde), que cela change-t-il ? Rien. Prenez 780 cm3 de Vialatte, que cela change-t-il ? Tout.

Poursuivons. Aussi grandiose que cela puisse paraître, ce livre est blanc. Et il y a un dessin de Chaval sur la couverture. Chaval, qui n’était pas un con, puisqu’il s’est suicidé. Chaval, qui n’a pas eu de chance, puisqu’il a fait ça en janvier 68, quel oiseau (rappelons que pour Chaval, Les oiseaux sont des cons) ! Bref, ce Chaval de trait ne manque pas d’air et il a le chic pour illustrer à point ce livre d’un dessin qui n’est que Bienséance dérisoire, quichottisme de salon, et absurdité ultra-signifiante… vous pouvez le voir dans ma note précédente et ici-même. Et c’est tout dire. Et c’est pour cette raison que je préfère dire autre chose, le contraire même de ce que je voudrais dire. Car c’est en lisant Vialatte qu’on se rend compte qu’il est proprement stupéfiant que le livre que je viens de refermer pour écrire cette note (je n’ose évidemment dire chronique), alors qu’il devrait logiquement s’enfoncer dans le bureau sur lequel je l’ai posé, reste dessus bien sagement, comme si sa maman l’avait parfaitement éduqué dans son enfance. Seulement, que sais-t-on de son enfance ? A-t-il seulement eu une enfance ? Rien ne le prouve. Tout prouve même le contraire. L’ordre, les lois de la physique, la cohérence, voilà bien ce qui est naturel sans quoi aucun anarchiste en mon genre ne serait là pour s’en étonner. Le livre repose sur le bureau, et c’est bien là ce qui est chose la plus terrible et la plus magnifique qui soit.

Il me faut enfin commencer cet article, c’est-à-dire lui donner une fin et, comme je n’ai pas confiance en ce que je viens d’écrire, bien que ce soit à mes yeux le meilleur article que j’aie pu écrire ici, je vais dire ce que sont ces Chroniques. Ce ne sont que choses grandioses et magnifiques, paradoxes qui coulent de source, chinoiseries qui varient avec les peuples, progrès qui fait rage, directeurs de prison qui s’évadent, malades qui meurent guéris, logiques invraisemblables et invraisemblances logiques, lenteur de la vitesse, je vous en passe… C'est le bon sens qui coule dans ses veines cependant que le non-sens coule dans ses artères ; et dans son cœur, ce n'est plus que champ de bataille entre les deux ; et pour le lecteur profusion de sens !